FÉDÉRER NOS TALENTS
Il est curieux que lors d’un jeu de société nombreux veulent à tout prix se tenir aux règles édictées. Pour quelle raison une règle formulée par une personne inconnue deviendrait elle une loi inéluctable ? Il semble clair que rode là une mystique d’auto asservissement. Pourtant il semble que le contrat établi entre les joueurs devrait avant tout définir les règles par lesquelles inter réagir. On a toujours à gagner à reconsidérer les modules élémentaires de fonctionnement d’un projet ne serait-ce que pour éviter l’impasse et l’ennui et au contraire obtenir le meilleur rendement de plaisir. Agir est une satisfaction en soi. L’accoupler à l’interchangeabilité que voudra bien nous procurer nos intelligences nous donne un plus large champ aux possibilités créatrices.
La construction des deux spectacles fut naturellement conditionnée par un désir de liberté. La liberté de laisser chacun exprimer ses vues et de les confronter à ses moyens propres pour les réaliser. Il faut une force émotionnelle, une ouverture d’esprit pour accepter les visions de l’autre ainsi que l’intelligence de comprendre l’intérêt qu’il y a, pour la richesse et l’efficacité du projet, à valider les partenaires. Le respect, le gout, l’humour, le discernement furent des armes essentielles pour que le projet collectif tienne la route. Chacun proposa son rôle. Il fut naturellement accepté dans la mesure où l’acte suivait la parole.
Dans le premier spectacle nous avions travaillé sur la base d’une collaboration de nos spécificités et talents pour un concept auquel nous adhérions, à savoir une représentation du vécu onirique de notre commune artistique. Chacun apportait son sketch, sa création, et un jeu de collage des diverses propositions permit une mise en scène. Le dernier mot me revenait ainsi qu’à Charly puisque nous étions à la source du projet. Mais la part qu’apportât chacun des quinze membres fut pour nous vitale.
Le deuxième spectacle procéda de la même intention mais avec une démarche inversée. Au lieu d’accepter à peu près tout et d’obtenir ainsi un kaléidoscope plutôt baroque, nous décidâmes de ne travailler que sur ce qui semblait résonner avec la représentation que l’on se faisait de l’autre. De nouveau le dernier mot me revenait ainsi qu’à Danny mais de même l’intervention des autres membres fut fondamentale.
Le résultat fut d’une cohérence toute en souplesse. Pourtant les deux travaux nous guidèrent vers de mêmes résultats, ceci, simplement du fait d’une sorte de compréhension intuitive de la raison d’être de notre organisation comme groupe aux intérêts réciproques.
Un point crucial de la réussite de notre jeu collectif fut d’avoir mis de coté nos egos. Il n’y eut jamais de chefs. Tout au plus des animateurs. Ni moi-même, Félix ou Dorian ne fonctionnions avec cette étrange mystique d’un travail au nom de la réussite d’une idée. Nous étions au contraire ouverts à la découverte du processus et des résultats inhérents à notre groupe. La curiosité et les inventions prônaient.
Cela nous permit d’éviter la tyrannie des concepts prédéterminés. Au lieu de constituer un conflit le choc des idées permit de nous libérer de toute dérive productiviste.