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J’entends déjà les réactions critiques. Que des méthodes d’autodéfense ne servent à rien face à une arme voire à des malades prêts à se faire exploser. Sans doute faille t’il ne rien faire et prier en espérant ne pas être celui qui se feras égorger ? Ces exemples de comportements simples et collectifs sont des armes efficaces. De s’en moquer est une réaction de complaisances à de bien pauvres critiques invoquant des raisonnements hâtifs, un soi-disant vécu cachant en fait un désarroi et un cynisme quant à l’inaptitude à intervenir. C’est une porte ouverte soit au renoncement soit à l’escalade de cette violence. Nous avons l’exemple des conséquences du droit au port d’arme pour tous aux États-Unis ; un taux d’homicides sans équivalent dans tout autre pays occidental. Exiger un régime plus militarisé serait faire le jeu de ceux qui ne demandent que cette opportunité pour mettre à bas la démocratie. Nous n’avons pas le luxe de prétendre détenir le bon sens commun en se vautrant dans l'illusion d'une menace mystique qui nous dépasse. C’est être dépassé par la réalité que de ne pas reconnaître un état de souffrance ou de guerre. C’est au nom de toutes les victimes de ces attentats qu’il faut agir. Ils ont payé de leur corps et de leur vie parce qu’ils incarnaient notre démocratie. C’est également en leurs noms que nous devons lui redonner un sens.
Notre faiblesse c’est avant tout la panique ou simplement d’être débordé par l’évènement. C’est par conséquent un manque de vigilance, un manque du sens collectif et un manque d’entraînement. La part reptilienne de notre cerveau nous offre autant les pulsions de fuite que d’agression. Notre cortex lui nous permet d’évaluer les stratégies. Coordonner nos pulsions et notre raison avec celles de la collectivité est notre meilleure arme.
Face au terrorisme nous débattons sur les limites que nous devons concéder à la liberté. Alors que plus que jamais nous devons au contraire nous investir à défendre nos libertés. On entend de plus en plus parler de protéger nos frontières, de créer des murs de séparation. D’une part tout mur est facile à transgresser – dito la ligne Maginot – d’autre part l’ennemi est de toute façon à l’intérieur également. Notre meilleure défense c’est une volonté collective et un tissu social autogérant l’organisation d’une autodéfense de nos libertés.
Né en France, d’origine Basque, ayant sillonné toutes les mers, puis devenu directeur des sports du paquebot Normandie, mon père, sitôt la France occupée par les nazis, partit s’enrôler comme officier de la marine anglaise pour défendre la démocratie. Il y apprit la langue et participa à la création de commandos. C’est ainsi que mes parents se rencontrèrent, ma mère travaillant à l’amirauté, comptabilisant depuis les toits, lors de raids, les avions allemands venant bombarder Londres et Portsmouth pour ensuite, une fois l’attaque terminée, prodiguer les premiers soins de chirurgie aux victimes ayant subi des atteintes de shrapnels, des brûlures ou des intoxications de gaz.
Mes parents m’expliquèrent la guerre. Chez eux une volonté de paix mais pas à n’importe quel prix. Pas celle de la collaboration et encore moins celle de la soumission. Plutôt conservateurs, ils faisaient néanmoins partie d’une génération aspirant à la réconciliation des peuples. D’ailleurs les communistes français refusaient d’aller se battre contre leurs camarades allemands. Autant pour des raisons de solidarité prolétarienne qu’à cause des consignes de Staline vis-à-vis du méprisable pacte de non-agression germano-soviétique. Ce sera pourtant entre autres des ouvriers et des paysans peu sensibles à une solidarité internationale et à la notion de luttes des classes qui participeront au démembrement de l’Europe. La paix est une force extraordinaire. Elle entraine la paix. Mais c’est se leurrer que de fermer les yeux à la guerre. Elle aussi entraine à la guerre. Il semble qu’il faille toujours aspirer à la paix non par le refus de la guerre mais par l’établissement d’une force collective éclairée et bienveillante toujours prête avant tout à ne pas tolérer les manœuvres et les menaces dont le but est de tester notre résolve, toujours prête à résister, toujours prête à dire non aux destructeurs, toujours prête aussi à détruire ce qui détruit et toujours prête à construire.
Nous sommes en guerre – depuis toujours – des guerres de toutes formes – économiques – sociales – souvent exportées et qui maintenant sont de plus en plus importées.
Daesh n’est pas plus intelligent ou plus terrible que ce qu’ont pu inventer les hommes dans leur misère. Il n’est qu’une mascarade religieuse et territoriale (le khalifat) pour valider le vol, le viol et le meurtre. Il invite le besoin de satisfaire les pulsions les plus primitives et destructrices. Il est un appel à tous les faibles pour surcompenser leur petitesse. Rien de nouveau.
Pas toutes les mafias sont potentiellement des terroristes en devenir mais ils sont tous des collaborateurs potentiels ne serait-ce qu’au niveau logistique. Ventes d’armes, stratégies, sentinelles, hébergeurs, programmeurs, spécialistes du renseignement, de la propagande, du lavage de cerveau (des petits pour en faire des enfants soldats). D’autre-part toutes ces populations ont des amis et des familles. Cela signifie que la masse plus ou moins solidaire est considérable. Les démocraties sont effectivement noyées dans une toile pouvant couvrir tous les espaces. Et par conséquent chaque endroit est potentiellement attaquable. Aucune structure policière, militaire et de renseignement est capable de juguler cela. Il est même remarquable qu’elle puisse résister autant. C’est tout à leur honneur mais la réponse contre le tissu social du chaos c’est le tissu social de la démocratie.
Avec tous les représentants associatifs de la communauté kurde de France, les combattantes kurdes étaient présentes les trois jours qui ont suivi les attentats à Oberkampf pour commémorer ce terrible massacre perpétré en plein cœur de Paris.
Plus tard, en Syrie, ayant appris les massacres du 13 novembre 2015 à Paris les guerrières kurdes ont fait une minute de silence. Ces femmes, au même titre que leurs hommes ont offert de nous protéger. Je ne pense pas qu’elles l’ont fait qu’au nom d’une idéologie marxiste- léniniste. Elles comprennent l’internationalisme de leur engagement. La réciproque devrait aller de soi.
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