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007

Le territoire ludique
et celui de la violence

Jouer pour évoluer – jouer pour réprimer


LETTRE D’AVRIL

« Tu avais environ 3 ans petit frère et je devais m’occuper de toi durant l’après-midi. J’avais pour projet d’aller voir un de ces films "épique" où des soldats avaient pour mission de transporter un énorme canon à travers l'Espagne. Je portais un manteau très ample en laine grise avec de grandes poches plaquées que maman m’avait confectionné. Je tenais ta petite main tandis que tu déambulais à mes côtés, quand soudain deux gosses me sautèrent dessus. L’un d’eux mis sa main dans ma poche, pour y voler le contenu puis détala. Faute d’argent nous ne pouvions plus aller au cinéma. Alors tu te mis à pleurer. Je finis par repérer l’un des larrons un peu plus bas, rue Léon-Frot. L’ayant coincé à l’intérieur de la porte cochère du numéro 7 je me mis à le frapper de mes poings, en lui criant de me rendre mon argent. Totalement pris au dépourvu il se recroquevilla contre le mur, essayant de repousser mon attaque. Je lui décrochai finalement un bon coup de poing dans l'œil. Il me rendit l’argent pour ensuite s’enfuir en braillant. Une fureur grise avait soudainement bondi sur lui et l’avait complètement effrayé. Bien sûr, son ami avait disparu depuis longtemps. Je suis alors revenue auprès de toi pour te dire de nous dépêcher pour arriver à temps au Gaumont, place Voltaire. Tes larmes séchèrent instantanément. Je revis le garnement le lendemain portant un gros œil au beurre noir. Il décampa aussitôt. Tu étais tellement pris par ce film que durant des mois, tu traînais un petit tabouret brun par une corde autour de l'appartement imitant les acteurs aux prises avec cette énorme batterie à travers toute la péninsule. Frank Sinatra et Sophia Loren jouaient dans ce film. Il était hors de question que ces galopins puissent s’en tirer après t’avoir fait pleurer! »


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AMITIÉS GUERRIÈRES

Durant notre enfance si, avec mes amis, elle n’était pas incluse dans nos jeux, la violence existait bien autour de nous. Il se trouve que nombre de petits chefs de bandes au sein de l’école m’affectionnaient. Ils me semblaient souvent très originaux et généreux. Sans doute nos différences constituaient une forme d’attrait exotique. J’étais après tout l’engliche mais plutôt bon en gym et aussi nul qu’eux en Français. Donc rassurant en quelque sorte. J’avais le rôle je crois du sensible un peu surréaliste. De plus, cette propension, typiquement Britannique, conciliant tradition et excentricité, amenait maman à m’habiller un jour dans l’absolu classicisme d’un accoutrement anglo-saxon, et le lendemain à me vêtir d’une chemise léopard du meilleur effet pour un garçon portant les cheveux en brosse, et ceci particulièrement durant une année où je devais supporter, même en classe, des lunettes de soleil prescrites pour réhabiliter les performances des pigments des cônes de l’œil, sans lesquels la détection du spectre lumineux irait se réduisant. En conséquence, au hasard des jours, un look Rock and Roll cohabitait allègrement avec celui traditionnel – blazer – long short en laine – longues chaussettes - de l’élève-modèle d’outre-Atlantique.
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