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FESTIVAL DES FOUS - AMSTERDAM ANNÉES 78 À 81

Le « festival des fous » s’installe dans les rues, les théâtres et les squats. La Hollande se trouve dans l’axe d’un croissant culturel marginal international composé de la West Coast, New York, Londres et Berlin. Dans la ville d’Amsterdam, mais également dans nombre de citées provinciales, convergent des acteurs, des poètes, des musiciens, des cinéastes, des photographes, des peintres et des graphistes issus des mouvances underground. Ce foisonnement constitue les fondations de nouvelles formes d’art et de créations multimédias. et se mettant à constituer les fondations de nouvelles formes de créations multimédias. C’est le solstice d’été. Dans le Vondelpark, derrière une rangée de buissons, un espace vert, une scène, une troupe de mimes. Il se met à bruiner. Une des deux mimes enjoint la petite foule, par gestes bien sûr, à se réfugier sur l’estrade. Un enfant intrigué par cette mobilité muette se prête avec elle et sa partenaire au jeu des mimiques. Satisfaisant sa demande, elles achèvent l’étrange dialogue en ôtant leurs T-shirts. À l’instant où leurs poitrines sont révélées les musiciens attaquent un air classique, mais hachuré brièvement, comme des arrêts sur image. Les mimes s’engagent alors dans une trajectoire parallèle de leurs corps. Des sortes de jumelles mécaniques dansantes s’immobilisant lors des ruptures musicales. Il n’y a pas 5 minutes nous étions dans un parc et maintenant nous nous trouvons dans un territoire de grâce et de mystère.
Je suis profondément troublé par l’évènement. Quelle vie que celle de comédien, arpentant les routes et transformant les lieux en des espaces jusque-là invisibles ! La scène apparaît comme un catalyseur pour tous modes d’expression.
Le soir même au Milky Way virevolte un homme combinant danse et expression corporelle. En se plaçant devant eux, en les fixant tout en dansant, il semble posséder la remarquable habilitée à révéler chez des personnes choisies arbitrairement une gestuelle en eux encore inconnue. Il donne envie de danser. Il donne l’envie de croire que l’on puisse réellement danser en nous animant par une sorte de tour de passe-passe, où le lapin sorti du chapeau serait une énergie transmise subrepticement du prestidigitateur à son audience

Quelques mois plus tard un ami me présente Félix. Celui-ci habite depuis peu la capitale Néerlandaise, et vit dans un superbe squat, une vaste maison bourgeoise du XVIIIème siècle le long d’un canal du centre. Sachant que je crée des photos et travaille des diaporamas il voudrait monter avec moi un spectacle. Il est mime, alors serais-je d’accord pour que nous soyons partenaires dans la création et la direction du show ? Je lui réponds qu’il devrait quand même voir mon travail, mais réalise que le projecteur ne fonctionne pas. Félix insiste – il est satisfait de ce qu’il a entendu sur mon compte et n’éprouve aucun besoin de le vérifier - cela devrait marcher, il en est persuadé. Pourquoi ne pas nous installer avec ses amis à Amsterdam ? Ce serait plus pratique voire nécessaire puisque nos travaux seront l’expression de nos rapports de vies. Et curieusement je lui dis oui, sans même me préoccuper de ce qu’il est réellement capable de faire. Un pressentiment domine : sans avoir à les énoncer, nos libertés ne sauront de toute manière tolérer que le ludique, l’urgent et le plaisir de l’autre.
Le désir d’action prend pied, inéluctable.

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